Mardi 7 janvier, peu avant minuit, le skipper Fives Group – Lantana Environnement est devenu Cap-Hornier ! Un graal pour ce marin de 40 ans qui en rêve depuis qu’il est enfant et qui consacre sa vie aux bateaux de course et à la mer. « C’était un petit truc sympa quand même… », souriait-il ce matin.
Après 2 mois de course, 3 océans et 3 caps, soit 17 000 milles (31 500 km) dans son sillage, le skipper Fives Group – Lantana Environnement vient d’entamer la remontée de l’Atlantique. Il a encore 7000 milles (13 000 km) à négocier, le dernier tiers de ce tour du monde
Remontée en terrain miné
Ces 4 à 5 semaines de course à venir sont peut-être moins impressionnantes que celles des mers du sud, car disputées sur un océan bien connu des marins du Vendée Globe, mais cette dernière portion de parcours est néanmoins criblée de pièges. A commencer par les dépressions orageuses et la mer cassante qui se forment le long des côtes sud-américaines, ses calmes aussi, les pêcheurs et plateformes pétrolières le long du Brésil, le pot au noir bien sûr, puis l’anticyclone des Açores et, pour finir, les coups de chien de l’hiver en Atlantique nord et dans le golfe de Gascogne.
Fatigués, eux ? Jamais !
Tout cela avec certaines voiles fatiguées voire inutilisables, un pilote toujours sans mode vent, et une inévitable fatigue générale dont les solitaires du Vendée Globe réussissent cependant à repousser les effets chaque jour et chaque nuit depuis le 10 novembre dernier…
Leur secret ? Cette énergie magique du dépassement de soi, de l’adrénaline du défi : un carburant diablement puissant, renouvelable à l’envie tant que le piment de la compétition et de l’aventure garde sa saveur.
Et cette énergie, à chaque instant de cette course, et ce depuis près de 2 mois, nous éclabousse et nous touche, nous, terriens admiratifs.
Le jeu reste ouvert !
A 7h ce mercredi matin, le skipper Fives Group – Lantana Environnement pointe en 23e position, 5e des Imoca à dérives, et il bataille à vue au sein d’un petit groupe de 5 bateaux. Si Jean Le Cam, 1er des bateaux à dérives, s’est envolé depuis longtemps, le jeu reste ouvert pour le classement très officieux des Imoca à dérives, même si Louis devra continuer de composer sans voiles de portant.
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Paroles de Cap-hornier !
Malgré une petite fatigue passagère et bien légitime, Louis nous raconte son passage du Horn, les mers du Sud et ce qui les attends en Atlantique…
Un petit truc sympa quand même…
« C’est une grosse étape de franchie. Et puis, voir ce cap en vrai, c’est quelque chose ! J’ai tellement rêvé devant ses photos, dans tous les bouquins que j’ai pu lire quand j’étais petit…
Là, il était sous mes yeux, de jour, dans des conditions magnifiques. C’est un petit truc sympa quand même…
Je suis passé près d’abord parce que c’était à priori par-là que ça passait le mieux pour sortir des calmes juste derrière le cap. Ce qui s’est vérifié. Et pour le plaisir des yeux ! »
On sort d’une immensité… C’était génial !
« On sort d’une immensité… C’était génial ! Tu es loin de tout, les conditions sont ‘’extrêmes’’, dans le sens ‘’sans limite’’, car il n’y a rien pour les arrêter. C’est froid, donc les systèmes sont violents : ça met un peu de pression… On a même eu la visite d’un iceberg ! Bref, on a eu un beau panel de ce que les mers du sud peuvent proposer ! »
Loin de tout, en mode régate
« En revanche, on a eu un Pacifique assez calme. Les choix stratégiques étaient limités, ce qui a fait des regroupements et une traversée assez longue. Mais ce n’était pas désagréable d’avoir un passage un peu reposant et paradoxalement en mode régate dans l’océan le plus reculé du monde ! »
Et ça continue !
« On est tous au près dans 10 – 15 nœuds de vent et tous bord à bord ! Conrad a croisé 0,5 mille devant moi tout à l’heure, Seb est à vue, juste derrière et Guirec est sous le vent ! C’est comme un entrainement avec Tanguy Leglatin ! »
Du vent, mais rien d’insurmontable
« Les deux derniers jours, il y avait de l’air, mais ce n’était pas insurmontable. On a vu bien pire ! C’était musclé parce qu’on était au reaching donc les bateaux allaient vite, ça tapait un peu, mais rien d’extraordinaire. »
Musclé, mais pas démentiel
« La dépression qui arrive semble moins grosse qu’annoncée il y a 2 jours. Et elle glisse plus sud que prévu, donc nous devrions passer dans son nord. Ça va être fort, musclé, mais à priori pas démentiel.
Aujourd’hui, on va devoir faire du près dans le nord-est de la dépression et elle fait du Sud, donc elle devrait passer dessous »
La remontée de l’Atlantique
« Je vais faire ma route, au jour le jour, en choisissant les angles qui me pénaliseront le moins en fonction de la garde-robe dont je dispose ! »
En quelques mots, on a un petit aperçu du condensé d’émotions qui traverse le marin solitaire, chaque instant de son tour du monde. Et ce flot d’énergie à déployer en permanence…
Il reste encore 4 à 5 semaines de course d’obstacle avant de boucler cette très belle boucle : le chapitre ‘’grand sud’’ se termine, mais l’aventure continue !